La directive européenne CSRD aurait dû être transposée en droit belge avant le 6 juillet, mais cette échéance a été manquée. Par conséquent, la Commission européenne a entamé une procédure d’infraction contre la Belgique. L’Institut des réviseurs d’entreprises (IRE) tire la sonnette d’alarme: “Ne pas agir dès maintenant, c’est risquer de perdre des clients et des partenaires.”
Quelles sont les entreprises qui rechignent à se conformer à la CSRD, et pourquoi?
Patrick Van Impe, président de l’IRE: “Certaines d’entre elles tirent prétexte de l’absence d’une loi belge spécifique transposant la directive européenne pour ne pas se lancer. En outre, parmi les premières entreprises concernées par la directive, beaucoup ont déjà une expérience avec la directive précédente sur le reporting non financier (NFRD). Ce groupe d’environ 150 grandes entreprises travaille depuis des années sur la durabilité et a acquis l’expérience nécessaire. Cependant, pour la deuxième vague, qui concerne plus de 2.000 entreprises, c’est un territoire nouveau. Cette vague menace de se transformer en un véritable tsunami, car bon nombre de ces entreprises ont peu d’expérience – voire aucune – en matière de reporting de durabilité, ce qui les rend hésitantes.”
Eric Van Hoof, vice-président de l’IRE: “Les entreprises qui ne se jettent pas à l’eau dès maintenant risquent de manquer de temps. La CSRD exige en effet une préparation minutieuse, notamment en lien avec l’analyse de double matérialité. Cela signifie que les entreprises doivent rendre compte de l’impact qu’elles ont sur la société et l’environnement, mais aussi de la manière dont les facteurs externes, et notamment leurs fournisseurs, influencent leur propre fonctionnement. Ce processus de cartographie des risques et des opportunités est complexe et ne saurait être précipité.”
Quel cadre de référence les entreprises peuvent-elles utiliser en l’absence d’une loi belge claire?
Patrick Van Impe: “Même si la loi belge n’est pas encore prête, les entreprises peuvent se préparer en s’appuyant sur la directive européenne, disponible depuis janvier 2023. Elle offre un cadre clair sur les sujets à aborder dans les rapports. L’European Financial Reporting Advisory Group (EFRAG) a quant à lui publié des normes de durabilité spécifiques, détaillant la façon dont les entreprises peuvent se préparer à ce reporting.”
Eric Van Hoof: “Les entreprises peuvent commencer par identifier les principaux facteurs de durabilité qui les concernent, qu’il s’agisse de critères environnementaux comme la consommation d’énergie et la gestion de l’eau, ou de critères sociaux et de gouvernance, parmi lesquels les conditions de travail et l’éthique des affaires. Elles peuvent ensuite mettre en place leurs systèmes de reporting et collecter les données nécessaires.”
Les entreprises peuvent-elles se passer d’experts externes, au vu de la complexité de ces questions?
Eric Van Hoof: “Bien que de nombreuses entreprises pensent avoir besoin d’une aide externe pour se conformer à la CSRD, ce n’est pas forcément le cas. Les entreprises familiarisées avec la durabilité pourront généralement accomplir une grande partie du travail en interne, à condition qu’une personne soit chargée de bien comprendre la réglementation. Pour les aspects plus techniques, en revanche, il peut être utile de faire appel à des consultants externes.”
Quels risques courent les entreprises qui ne se préparent pas dès maintenant?
Patrick Van Impe: “Celles qui n’ont pas encore franchi le pas sont déjà en retard. Elles sous-estiment le travail nécessaire pour se conformer à la CSRD. La directive exige un rapport de durabilité détaillé et correctement étayé, contrôlé par une tierce partie indépendante. Les entreprises qui prennent des mesures dès à présent peuvent limiter leur retard et éviter de devoir travailler dans l’urgence lorsque l’échéance approchera.”
Eric Van Hoof: “Les entreprises qui ne se conforment pas à temps risquent de perdre des clients ou des partenaires. Leur image de marque en tant qu’employeur peut également en souffrir, car les talents choisissent de plus en plus des entreprises aux performances de durabilité solides. Même les investisseurs peuvent se retirer, car les banques imposent des exigences ESG de plus en plus strictes. Tout est interconnecté.”
Belgian Awards for Sustainability Reports
Le 18 novembre, l’IRE récompensera pour la 23e fois les meilleurs rapports de durabilité belges. Cet événement est une excellente occasion de découvrir les meilleures pratiques en matière de reporting de durabilité, de comprendre les stratégies d’autres organisations et d’échanger des expériences, notamment autour de la CSRD. Vous pouvez vous inscrire à cette adresse: https://www.ibr-ire.be/en/bas