Les entreprises ont tout intérêt à lutter contre la fracture numérique

Linde Verheyden, Director Public Affairs chez BNP Paribas Fortis et présidente de DigitAll

La fracture numérique persiste en Belgique. La digitalisation s’accélère et laisse de nombreuses personnes au bord de la route. Des seniors, mais aussi des jeunes et des actifs. “Les entreprises ont un rôle important à jouer pour booster les compétences numériques et faciliter l’accès à leur offre”, observe Linde Verheyden chez BNP Paribas Fortis.

En Belgique, 40% de la population âgée de 16 à 74 ans est en risque d’exclusion numérique. Et si les seniors sont souvent perçus comme les plus vulnérables, les jeunes rencontrent aussi des difficultés. Près d’un tiers des 16-24 ans possèdent de faibles compétences numériques, avec un pic à 52% chez les peu diplômés.

“Les gens pensent souvent que les jeunes sont des digital natives parce qu’ils maîtrisent les réseaux sociaux”, note Linde Verheyden, Director Public Affairs chez BNP Paribas Fortis. “Mais réaliser une vidéo TikTok ou scroller sur Instagram ne signifie pas qu’ils savent utiliser les services bancaires en ligne ou remplir un formulaire de candidature.”

Un équipement adéquat

La pauvreté joue bien sûr un rôle. 25% des personnes vivant dans la précarité disposent pour tout équipement d’un smartphone. “Même s’il offre un accès de base, il est inadapté pour des tâches importantes comme rédiger un CV ou remplir une déclaration fiscale. Sans un ordinateur et une connexion internet stable, de nombreuses portes numériques restent fermées.”

Mais le manque de compétences explique aussi la fracture numérique. Beaucoup de gens n’ont jamais appris les bases, comme utiliser un moteur de recherche, joindre un fichier à un e-mail ou télécharger une application. Or, sans ces connaissances élémentaires, le monde numérique reste inaccessible.

Sans les compétences et les outils adéquats, de nombreuses portes numériques restent fermées.

Linde Verheyden, Director Public Affairs chez BNP Paribas Fortis et présidente de DigitAll

Attention au stress numérique

Enfin, il y a ce qu’on appelle le stress numérique : la crainte de commettre des erreurs, d’être piraté ou de voir sa vie privée exposée. “Même lorsqu’elles ont les compétences, certaines personnes excluent délibérément les services numériques”, précise Linde Verheyden. “La technologie suscite chez eux méfiance et inquiétude. Ce sont des barrières majeures.”

Une checklist pour tester l’accessibilité

Les entreprises peuvent jouer un rôle central dans la réduction de la fracture numérique. “Ce n’est pas seulement un problème social, mais aussi un défi économique. Les personnes moins connectées d’aujourd’hui sont tant des clients que des employés potentiels.” Aux yeux de Linde Verheyden, la première étape essentielle pour les entreprises est d’en avoir conscience.

Soutenir les employés est aussi très important. La Ville de Gand a ainsi offert une formation aux agents des espaces verts pour leur apprendre comment remplir leur déclaration fiscale en ligne. De telles initiatives fournissent des compétences pratiques et renforcent la confiance en soi. “Faire un ‘check digital’ est un must. Ce n’est pas parce qu’un employé travaille quotidiennement sur un ordinateur portable qu’il est forcément compétente sur le plan numérique.”

DigitAll, la plateforme de l’inclusion numérique

Linde Verheyden préside DigitAll, une plateforme qui réunit plus de 130 organisations pour partager connaissances et bonnes pratiques en matière d’inclusion numérique. “La convivialité des outils est indispensable”, insiste-t-elle.

DigitAll a développé une checklist permettant aux entreprises de tester l’accessibilité de leurs applications et sites Web. “Pour les personnes dotées de compétences numériques limitées, une interface simple peut faire la différence entre participer et abandonner.”

Pour les personnes dotées de compétences numériques limitées, une interface simple peut faire la différence entre participer et abandonner.

Linde Verheyden, Director Public Affairs chez BNP Paribas Fortis et présidente de DigitAll

Des smartphones adaptés

BNP Paribas Fortis, par exemple, prend des mesures concrètes pour promouvoir l’inclusion numérique. Depuis 2021, la banque soutient une chaire à la VUB qui étudie le lien entre inclusion numérique et droits humains. Elle collabore aussi avec Emporia, un fabricant de smartphones faciles à utiliser destinés aux personnes moins à l’aise avec le numérique.

Des campagnes de sensibilisation contre le stress numérique et la fraude font également partie de son approche. “Nous voulons que nos clients utilisent nos outils en toute confiance”, résume Linde Verheyden. Et grâce à un partenariat avec bpost, tous les clients de BNP Paribas Fortis peuvent toujours se rendre dans le bureau de poste le plus proche pour effectuer leurs opérations bancaires de base.

L’inclusion numérique exige un effort constant de la part des entreprises, des pouvoirs publics et des établissements d’enseignement, conclut Linde Verheyden. “Personne ne doit être laissé au bord de la route. Les entreprises qui agissent dès maintenant contribuent à la fois à une société meilleure et à leur propre avenir dans un monde de plus en plus numérique.”