Une roue à aubes peut-elle remplacer une centrale nucléaire?

Deux ingénieurs ont mis au point une centrale hydroélectrique compacte qui produit de l’électricité en imitant le système des tourbillons… et permet ainsi d’éviter de construire d’immenses barrages. “En Belgique, nous avons le potentiel de produire annuellement plus d’électricité que Doel 1 et 2 réunis”, déclare Walter Buydens, CEO de la start-up Turbulent.

Voici huit ans, les étudiants en ingénierie Geert Slachmuylders et Jasper Verreydt ont imaginé une petite turbine hydroélectrique qui convertit l’énergie des rivières en électricité en utilisant le fonctionnement du tourbillon. Très vite, leur idée a remporté plusieurs prix.

Aujourd’hui, leur start-up Turbulent est devenue une entreprise de croissance prometteuse, avec des clients et des projets internationaux. “Notre turbine crée un tourbillon pouvant produire de l’électricité à partir d’un dénivelé de 1,5 mètre seulement”, chiffre Jasper Verreydt. “Pour ce faire, nous construisons une petite dérivation à côté du cours d’eau. À l’extrémité de cette dérivation, nous provoquons un tourbillon dans un bassin en spirale. Grâce à une vis située au milieu, la rotation est convertie en énergie, puis en électricité.”

La plus petite turbine fournit suffisamment d’électricité pour approvisionner 30 familles belges. La plus grande affiche une capacité de 70 kilowatts, de quoi fournir de l’électricité à 140 ménages par an.

Système modulaire

“Nos turbines peuvent être combinées pour créer des centrales hydroélectriques encore plus grandes”, ajoute Walter Buydens, CEO de Turbulent. “Elles conviennent donc aussi bien à l’approvisionnement en électricité de villages et d’hôpitaux isolés dans les pays en développement, qu’à celui d’entreprises industrielles de notre région, et même de grands ports.”

Notre turbine crée un tourbillon permettant de produire de l’électricité à partir d’un dénivelé de 1,5 mètre seulement.

Jasper Verreydt, cofondateur de Turbulent

Fortes de leur forme compacte et de leur fonctionnement semblable à celui d’une roue hydraulique, ces turbines sont nettement plus faciles, rapides et économiques à installer que les versions beaucoup plus encombrantes d’une centrale hydroélectrique classique.

Des études menées par l’université technique de Delft ont montré qu’elles ne nuisent pas à la vie piscicole ni à la biodiversité de l’eau. En outre, l’installation d’une turbine est une opération considérablement moins complexe que celle d’une éolienne sur terre ou en mer, par exemple.

Une alternative aux générateurs diesel

Après une petite installation-pilote à Tielt-Winge, Turbulent a testé sa technologie à plus grande échelle en collaboration avec la start-up Chile (qui émane du gouvernement chilien) et Flanders Investment & Trade: “Au Chili, nous avons placé notre premier prototype industriel de 15 kW dans un canal d’irrigation”, précise Jasper Verreydt. “C’est à partir de ce moment-là que nous avons commencé à nous développer.”

La start-up a déjà levé près de 3 millions d’euros, tandis que 17.000 prospects affluent chaque année du monde entier. Des projets sont en cours au Portugal, en France et en Italie, entre autres. Aux États-Unis, en Asie et dans certains pays d’Afrique, les générateurs diesel polluants sont, grâce à Turbulent, remplacés par une alternative écologique.

Regard vers l’avenir

Les turbines sont conçues pour durer. Soumises à un entretien peu fréquent, elles présentent une durée de vie estimée de 30 ans, ce qui les rend particulièrement durables.

“Si nous pouvions exploiter toutes les possibilités et tous les sites de notre pays pour y installer notre système – pensez aux barrages, aux écluses, aux anciens moulins à eau et aux canaux navigables –, nous pourrions produire 1,8 MW par an avec toutes ces turbines”, conclut Walter Buydens. “C’est plus que les centrales nucléaires Doel 1 et 2 réunies!”