“Une stratégie ESG et une gouvernance solides aident à lancer des solutions innovantes sur le marché”

Les entreprises considèrent encore trop souvent leur stratégie ESG indépendamment de leur stratégie commerciale. Or, la combinaison des deux permet de transformer la théorie en pratique, soulignent Ann-Françoise Versele (Bekaert) et An Vanderhulst (KPMG).

Ces dernières décennies, pour connaître les performances d’une entreprise en matière de développement durable, il suffisait de consulter ses rapports annuels. En revanche, dans la mesure où les piliers ESG que sont le climat, l’individu et la société faisaient l’objet d’un reporting très différent, il était difficile de comparer les entreprises.

Cette situation changera prochainement avec la CSRD. “Cette directive européenne exige en effet des entreprises qu’elles rendent compte de manière transparente de leurs initiatives ESG”, précise An Vanderhulst, Director Principal Enterprise Risk & Assurance chez KPMG Belgique. “De plus, comme elles doivent établir des rapports mieux détaillés, il sera possible de les examiner d’un œil plus critique.”

Stratégie d’entreprise et stratégie ESG

Les grandes entreprises sont les premières à devoir rendre des comptes en vertu de la CSRD. Et beaucoup d’entre elles ont encore du chemin à parcourir, note An Vanderhulst: “De nombreuses entreprises s’efforcent de respecter l’échéance, mais il leur faudra un temps considérable pour intégrer cette dimension dans leurs activités quotidiennes. Souvent, elles envisagent trop la stratégie d’entreprise et la stratégie ESG comme deux aspects distincts.”

“La durabilité ne se limite pas à la compliance ou au marketing, elle doit être adoptée en interne. Mais c’est un processus progressif.”

An Vanderhulst, Director Principal Enterprise Risk & Assurance chez KPMG Belgique

Ce n’est pas le cas chez le spécialiste du fil d’acier Bekaert, où Ann-Françoise Versele occupe le poste de Global Head of Sustainability. “Depuis 2011, nous établissons des rapports sur le développement durable conformément aux normes applicables; à nos yeux, le passage à la CSRD est une étape logique. Les contributeurs à ce rapport sont le CFO, le COO, les auditeurs et moi-même. Si nous gérons chacun une partie du rapport annuel, le développement durable est un sujet commun.”

Le rapport ESG est un travail d’équipe qui prend en compte les contrôles et les processus internes. “Il faut définir les indicateurs à partir desquels les rapports sont établis et trouver la manière la plus efficace de compiler les données”, estime An Vanderhulst. “Cela exige une gouvernance solide, afin d’être sûr que les informations communiquées sont correctes et cohérentes. Actuellement, beaucoup d’entreprises sont incapables d’extraire ces données du système en appuyant simplement sur un bouton, ce qui accroît la nécessité de processus et de contrôles solides. Il ne faut pas non plus négliger la culture d’entreprise: le développement durable ne se limite pas à la compliance ou au marketing, il doit être adopté en interne et faire partie de la mission de l’entreprise pour produire des résultats efficaces. Or, cette culture ne peut être introduite du jour au lendemain: elle doit être adoptée progressivement.”

“L’accent placé sur la durabilité permet d’alléger les coûts, de travailler plus efficacement et d’apporter des solutions innovantes sur le marché.”

Ann-Françoise Versele, Global Head of Sustainability chez Bekaert

Exploiter de nouveaux marchés

L’accent placé sur la durabilité garantit également la création de valeur. “Une stratégie ESG bien développée a un impact sur votre réputation et vous aide à attirer des talents; elle permet aussi d’alléger les coûts, de travailler plus efficacement et de lancer des solutions innovantes sur le marché”, détaille Ann-Françoise Versele.

Ces dernières années, Bekaert a développé un certain nombre de produits ayant un impact positif à la fois sur les clients et la société. “Pensez à Dramix^©, une solution pour le renforcement du béton, qui nécessite moins d’acier et de ciment”, illustre Ann-Françoise Versele. “Ou encore à Ampact™, notre solution pour le bobinage des moteurs électriques dans les véhicules à batterie. Ce fil de cuivre doté d’un revêtement innovant rend les voitures électriques plus efficaces et autorise une recharge plus rapide. Ces produits sont la meilleure preuve que l’accent mis sur la durabilité peut aider à conquérir de nouveaux marchés. En laissant les dirigeants donner l’exemple et en confiant autant que possible les décisions aux unités opérationnelles, vous embarquez tout le monde dans le processus, ce qui vous procure une bonne longueur d’avance.”